Toujours la Garavogue.

Slig’oh, Slig’eau, Sligo !

The very first time.

C’était un jour de juillet, probablement vers 2004. Pour le seconde année consécutive, j’encadrais un groupe de jeunes français venus apprendre l’anglais en Irlande. Tous les samedi, nous partions en escapade dans la région du Mayo, poussant jusqu’à Wesport et le Connemara. Puis, un jour, l’envie vint à ma supérieure de modifier le programme et de nous envoyer à Sligo. Je me revois encore descendre du bus, donner les consignes de sécurité élémentaires à mes ados puis me demander, une fois tout ce joli monde parti : “Et maintenant ?”

La réponse fut aussi simple qu’évidente à trouver : marcher, errer, explorer, se promener. Très vite, j’ai compris que je tombais, une fois de plus, une fois encore, amoureux. Ce ne fut pas un coup de foudre violent, intense, presque fatal. Ce ne fut pas non plus un éclair qui m’a traversé de haut en bas, me faisant ressentir des frissons le long de ma colonne, sous une pluie battante et alors que résonne le tonnerre. Non. Ce fut plutôt un coup de cœur doux et tendre, lent et intime. La découverte des canaux. Un concert dans une rue. Des sourires sur les visages. L’amertume et la fraîcheur d’une bière en terrasse. Des accords dans l’air. 

C’était ma première fois à Sligo, et cet été, près de douze après mon dernier passage, j’étais de retour.

Sligo, la cité des eaux calmes

Et au milieu coule la Garavogue.

Qu’on le veuille ou non, Sligo est une cité aquatique. En effet, que l’eau coule sous les ponts ou qu’elle tombe à verse du ciel, elle est en tout cas un élément incontournable de la ville qui est d’ailleurs coupée en deux par la rivière Garavogue, principal point de repère de toutes les errances. Vous ne pourrez d’ailleurs pas la manquer lorsque vous découvrirez à votre tour la capitale du Sligo Co., tellement elle est omniprésente. 

Un spectacle banal de Sligo

Ce serait d’ailleurs une hérésie que de ne pas profiter des charmes offerts par cette promiscuité liquide car se promener le long des quais est une activité très prisée des locaux et des touristes. Un pas en entraînant un autre, on a très vite fait d’oublier les soucis du quotidien et rechercher plus la compagnie des palmipèdes que de ses congénères, surtout lorsque se dévoilent les paysages locaux, timides et cachés.

Là-bas, au loin.
Un autre spectacle banal de Sligo.

A quinze années d’intervalle, entre avant-hier et aujourd’hui, je m’aperçois, avec un sourire ironique aux lèvres, que je ne recherche plus spécialement la frénésie et l’activité incessante. Ce qui autrefois était ma motivation première à explorer est devenu un accessit non primordial dans mon existence de voyageur. Fini donc le tapage et bienvenue à la tranquillité, surtout lorsqu’elle est forestière et familiale. Comment ne pas apprécier la quiétude d’un sentier qui serpente le long d’un lough, sous les frondaisons arboricoles, à regarder d’un œil amusé les enfants courir tout en serrant la main de l’être aimée ?

La récolte fut riche.
Les barques invitent aux voyages.

Tantôt urbaine, tantôt forestière, tantôt dressée, tantôt sauvage, la Garavogue semble dicter le rythme de la ville selon ses humeurs. Assis sur une table à son bord, c’est l’envie de raconter ses vies, d’échanger, de discuter. Parcourue et longée, c’est le temps qui ralentit, se fige, se détend imperceptiblement. Urbaine et campagnarde à la fois, plus à un paradoxe près, elle semble vouloir accueillir tout le monde, sans préjugés ni excès de zèle. De jour comme de nuit, elle s’offre aux regards de tout un chacun, pour une seconde ou pour la vie.

Et sous un pont coule la Garavogue
Jeux de lumière en la ville endormie.

Se donner le temps d’avoir le temps.

Après notre épopée familiale sur la Wild Atlantic Way et les routes du Donegal, Sligo fut un arrêt parfait pour passer en douceur de l’isolation pastorale à l’urbanisme de Dublin. A l’aller comme au retour, nous avons apprécié de pouvoir nous y arrêter une soirée, deux nuits, une journée. Nous avons apprécié nos petites déambulations humides, nos rencontres (im)prévues et nos jolies excursions pédestres. Certes, Sligo reste une petite ville avec ses 20 000 habitants. Certes, elle ne justifie pas forcément un voyage en Irlande rien que pour elle seule mais elle possède cependant quelque chose d’unique, de fabuleux, et de rare : elle offre la possibilité d’avoir le Temps, d’avoir du Temps et de ne l’avoir que pour soi. 

Toujours la Garavogue.

En ces villes où les horaires sont quasiment immuables, la course contre la montre parait ne pas exister. Ce qui n’est pas possible aujourd’hui le sera demain car il ne peut en être autrement. On fait, bon gré mal gré, sien de la météo aléatoire et on sait qu’il sera possible, de toute façon, de se réfugier ici ou là pour manger un scone chaud, boire une pinte fraîche ou trouver simplement la chaleur d’une discussion humaine au zinc du premier pub venu…

Bien sur, il serait possible de transposer ces dires dans n’importe quelle autre ville, selon l’expérience que vous y avez vécu, selon votre ressenti et votre Histoire. Pourtant, il y a quelque chose de spécial à Sligo, une once de Je-ne-sais-quoi saupoudrée de Je-ne-saurais-dire et parsemée de Je-ne-sais-pas. Quelque chose de futile et solide à la fois. Quelque chose sur lequel je ne saurais mettre le mots mais qui rend, pour moi, Sligo si unique. N’est-ce pas, en fait et après tout, le principal ?

Sligo : theTreshold of the North.

Si vous regardez attentivement une carte des liaisons ferroviaires irlandaises, vous remarquerez vite quelque chose de très spécial : Sligo est le terminus de la ligne qui monte vers le nord. Aucun ne dépasse la gare, qui marque donc le point d’arrêt, comme une dernière étape incontournable avant de s’éloigner de la civilisation. Au-delà, il faut pouvoir compter sur ses pieds, ses roues ou son véhicule. Finis les trains, finis les rails, finis les wagons avec leurs sièges nominatifs, le wifi et les prises électriques !

Attention au départ, direction Dublin !

Pour autant, cela ne signifie pas que vous êtes bloqués à Sligo (et ce serait d’ailleurs bien dommage) car il y a quantité de choses à faire dans la région, toutes accessibles à courte distance. Vous pouvez par exemple aller rendre hommage à William Butler Yeats, LE héros local, poète et dramaturge, prix Nobel de littérature (cuvée 1923) et, pour faire court, l’un des plus grands auteurs irlandais de tous les temps. Sa tombe se trouve au cimetière de Drumcliff, à côté d’une très jolie église. L’épitaphe est des plus curieux et invite à la réflexion !

Pensées d’outre-tombe.

Une autre activité possible (et très, très recommandée) est de se diriger au nord-est de la ville, de longer le Glencar Lough et de vous arrêter aux chutes éponymes, localisées par une aire de jeu, un café et une vue démentielle sur les paysages environnants. Le lieu est certes fréquenté mais très photogénique et ne nécessite que 5 minutes de marche sur les mains depuis le parking (ce qui ne casse pas trois pattes à un canard comme dirait Laurent C, le buveur de thé du Kiffistan). D’autres balades, plus exigeantes, sont aussi réalisables.

La batterie est décédée après ce cliché.

Moralité : ne vous limitez pas à Sligo, trouvez-vous un moyen de transport et partez explorer les alentours, la région en vaut vraiment la peine !

Le petit guide pratique d’un séjour familial à Sligo

Nous sommes restés trois nuits et deux jours à Sligo. Voici donc un petit guide personnel, 101% testé et validé, destiné à vous aider pour l’organisation de votre séjour. Il vient en complément des conseils et recommandations de l’office de tourisme local !

Se rendre à Sligo

Pour le coup, il n’est guère compliqué de se rendre à Sligo. En voiture depuis Dublin, cela prend 200 kilomètres et environ trois heures de conduite sans vous presser. En train, encore une fois trois heures, pour un coût d’environ 90€ aller-retour pour une famille (deux adultes et deux enfants), en vous y prenant à l’avance (forcément, le plus tôt est très souvent le moins cher). Les liaisons en bus (via Galway) sont également envisageables, en étudiant bien le planning !

Dormir à Sligo

Nous avons testé deux hébergements différents : une auberge de jeunesse et un appart’hôtel. Le premier, le Railway Hostel, est situé à un jet de pierre de la Gare. Accueil très sympathique du gérant, bâtiment annexe grand et bien entretenu. Les lits sont sans reproches (mais il ne faut pas vouloir relever la tête brusquement en pleine nuit : bobo en prévision). Un bon plan classique et agréable, avec un prix de 80€ pour une chambre familiale “en-suite”, avec salle de bain privée et petit-déjeuner (céréales) inclus et parking gratuit.

Pour notre second passage, nous nous sommes tournés vers un appart’hôtel plus privatif et un poil plus luxueux. Deux nuits avec des chambres pour chacun, le tout situé dans une résidence destinée – selon les locaux (et Sandra de Mots de Voyageuse) aux étudiants ERASMUS : Miligan Court. L’accueil (situé dans le parking) est courtois, professionnel et efficace. Les lieux sont bien foutus même si nous avons trouvé le système pour l’eau chaude un peu tortueux, de même que la présence des escaliers regrettable. Cela reste cependant une bonne adresse que nous avons payé 170€ pour deux nuits (avec tout le confort d’un réel appartement équipé), assez bien située et calme.

Manger à Sligo

Pour le coup, étant donné le confort de notre installation, nous n’avons testé qu’une seule adresse où manger, une pizzeria dénichée le long des quais (forcément !) : la Fabbrica. Accueil nickel, serveur aimable, matériel pour enfant (chaise haute, crayons de couleur, set de coloriage) proposé de suite. Repas agréable à défaut d’être mémorable. L’addition était environ de 50€ pour la famille.

Un spot (très, très, très) recommandé si vous aimez les scones et le bon café : l’Osta Cafe and Wine Bar. Bien situé, sous les arcades, pas si cher que ça (quoique…) et avec des produits d’une super qualité. C’est un spot très sympathique pour se poser au chaud et discuter avec d’autres blogueurs (coucou Sandra) !

Que faire à Sligo ?

Le plus simple : vous promener, encore et toujours. Suivez la rivière en vous dirigeant dans le sens du courant et laissez guider par votre instinct. Une très belle aire de jeux est disponible pour les enfants et un parcours de santé permettra aux plus vieux de se remettre en forme.

Petite curiosité sur le chemin : une tombe à couloir du Mégalithique transformée en… rond-point ! Quelques sentiers permettent de découvrir la ville plus longuement et on trouve également un musée dédié à Yeats.

Pour une sélection plus exhaustive : Attractions in Sligo.