Ponctuation intérieure

Il parait, selon quelques autorités haut placées, que le vendredi, c’est permis.

Ne sachant pas spécialement du coup ce qui est permis (donc du coup, plus interdit), je décide de penser, de rêver, de m’évader des agressions textuelles et psychologiques de ma chère capitale.

Les yeux levés vers le ciel et les pieds solidement ancrés sur Terre, je jette un regard attendri sur ma chronologie personnelle, quelque peu perdu entre les nombreuses errances des dix dernières (déjà !) années.

De l’Irlande en 2003 à la Nouvelle Zélande en 2012, mes pas m’ont guidé vers de nombreux horizons, créant un melting-pot mémoriel assez jouissif qui fait ma richesse et mon angoisse; j’y suis allé, j’ai aimé, comment et pourquoi vais-y retourner, si j’y retourne !

Interrogation

Souvent, je repense à certains moments bien précis, à des instants marqués du sceau du bonheur. Je me revois, bondissant comme le caribou moyen, hululant sous la lune ou déclamant, d’un air assuré, après 5 minutes passées quelque part: “Mais c’est le Paradis ici !”.

Je me revois aussi bien plus déprimé, me demandant quel Diable vicelard, cornu et fourchu a bien pu me pousser à m’aventurer dans le X²ème plan alakon dont le seul résultat envisageable (et bien connu en amont) ne peut être qu’une galère sans nom, bordel indéfinissable aux conséquences d’une chierie à la profondeur abyssale.

Exclamation

Dans cette multitude d’expériences différentes, je me suis construit, façonné, assemblé un truc associant très vaguement un baroudeur égaré à un sédentaire convulsif, une espèce d’ermite asocial mixé à un ébahi éternel, un pont construit entre deux abîmes, du là-bas à ici en passant par nulle part et everywhere.

Les gens qui me revoient ont toujours la même sempiternelle question à la bouche, qui semble si banale mais qui me colle salement à la peau: “Alors quand repars-tu” ?

Je devrais me sentir quelque part flatté de me voir associé à des voyages, des trips, des balades. Ce cliché du sac à dos arrimé, des chaussures prêtes à vagabonder d’opportunités en opportunités, toujours ready, sur le pont, ne sachant pas où aller mais y allant quand même.

Pourtant, dans cette année qui est la trentième, je me sens comme une girouette sur son clocher: je tourne sur moi-même dans l’infini des possibilités, au gré des vents. Je fais face un jour à une envie de repartir, le jour suivant à un besoin nécessaire de me poser, d’attaquer les mille projets auxquels je rêve et dont je me me jure quotidiennement qu’ils ne subiront pas ma procrastination habituelle, sans que jamais ne s’arrête cette ronde diabolique et chérie.

Néanmoins, je reste d’une zennitude quasi absolue.

Je souris devant l’affolement parisien, devant l’énervement latent d’une minute de perdue, devant les petits riens transformés en grand tout.

Je rigole plus franchement devant la découverte de l’évidence, devant la mauvaise foi, devant les aléas gravissimes du quotidien citadin.

Je m’esclaffe même carrément devant le banal, le normal, le prévu, sans aucune ironie ni mauvais esprit, étant juste sujet au léger et au calme.

En même temps et souvent, j(e m’)énerve, j(e m’) agace, j(e m’)exaspère autant que faire se peut.

Troll dans l’âme, j’aime à titiller, taquiner, embêter. Je vote pour le parti de la mauvaise foi, du “c’est pas moi, c’est lui” et je déverse souvent des flots ininterrompus de connerie manufacturée, garantie sur commande.

Ceci étant dit et cet article ayant bien dévié, encore une fois, du but originel (je voulais parler d’un pays parfait composé de tous mes souvenirs…), force m’est cependant de constater que je me suis bien épanché, une fois de plus, et que ma soif d’écriture s’est tarie (si tant est qu’une soif puisse se tarir).

Je vais donc conclure , sans le relire, ce 59Xème article par la seule fin possible:

PS: J’ai menti, j’ai relu.