Black’n’White Stories

L’Irlande. 5000 ans d’Histoire(s) : c’est ce qui m’a été donné de découvrir pendant une petite semaine, dans la région orientale des Terres Ancestrales, située à un jet de pierre de Dublin. Entre châteaux à l’intérieur aussi riche que la grisaille de leur façade, cairns aussi vieux que le Monde lui-même ou encore petites villes parsemées de ruines et de monuments, j’ai appréhendé et touché du doigt une autre Irlande, différente de celle que je connaissais déjà. Avant de vous raconter tout cela bien plus avant et de vous narrer par le détail ce que vous devriez y faire et y voir, je vous propose dans un premier temps une balade photographique en 1800 mots et 32 photos noir et blanc à travers lesdites Terres Ancestrales.  Explorons donc ensemble quelques uns de ces lieux magiques empreints d’une atmosphère comme nulle autre semblable et marchons hors des sentiers battus pour un voyage irlandais hors du commun !

Black'n'White

 

L’abbaye cistercienne de Mellifont

Le plus gros bâtiment en pierre de son époque et la première implantation cistercienne en Irlande : voici ce que propose le remarquable site de Mellifont, avec ses belles ruines bien conservées en dépit du passage des siècles. L’état de conservation est étonnant et  la pièce majeure, qui ne cesse d’attirer les regards (et les objectifs) est le l’édicule où se trouvait le Lavabo, une fontaine qui ne servait à rien d’autre qu’à se laver les mains avant de passer au réfectoire. Au détour des explications du Guide, j’ai compris l’importance qu’a joué ce lieu dans le développement des communautés religieuses en Irlande à la suites des Temps Obscurs, notamment en ce qui concerne l’auto-suffisance et les enjeux politiques d’une centre devenu populaire parmi les habitants suite à son expansion. Il flotte dans l’air comme un parfum un petit peu suranné, presque teinté de recueillement, le tout baignant dans un étonnement croissant au fur et à mesure des anecdotes et des informations dévoilées : saviez-vous que le Lavabo était construit avec des pierres venues de Bath et de Caen ? Pour la petite histoire, le créateur de l’Abbaye, Saint Malachie, a décidé de créer ce lieu suite à une visite (et un séjour prolongé) dans l’Abbaye de Clairveaux, alors qu’il se rendait à Rome pour rencontrer le Pape : on voyageait déjà bien loin à l’époque !

Le site de Mellifont Abbay

Vue du lavabo de l'intérieur

La porte de la chapelle de Mellifont

La colline royale de Tara

S’il est un lieu qui m’a le plus marqué pendant ces quelques jours passés en Irlande, je crois que c’est la Colline de Tara, site mythique que je n’avais jamais eu l’occasion de découvrir jusqu’à présent. Sans revenir sur la longue Histoire du lieu, aussi compliquée que discutée, sachez simplement que cette colline était l’endroit où furent sacrés certains Rois d’Irlande dans les temps anciens. Elle est de même considérée, selon les croyances, comme une ancienne Capitale de l’île, ce qui donne de belles références dans un CV ! En-dehors donc de ces éléments, une particularité m’a sauté aux yeux : le site n’est pas bigot, pompeux, surprotégé. De par sa situation géographique et son élévation, c’est un délice panoramique à 360°. De par sa gratuité, c’est un emplacement de choix pour les familles. De par son Histoire, c’est un immanquable pendant un voyage sur les Terres Ancestrales de l’Est. De fait, tout concorde pour créer… quelque chose. Je ne parle pas ici d’un simple endroit où s’arrêter pour apprendre. Non. Je parle d’un endroit où l’on se sent bien, où il semble exister une communion entre tout et tous. Ainsi, à quelques mètres de nous, pendant que nous écoutions les explications de notre guide, un groupe dormait, les yeux clos et les respirations calmes. Au loin, un berger et son chien réunissait le troupeau. Quelques mètres devant nous, de jeunes femmes refaisaient leur Monde avec forces rires. La cohabitation entre les Pierres Historiques, le vol des corbeaux, les croix solitaires et les déplacements humains est simple, naturelle et juste belle. Je pensais jusqu’à présent connaitre l’Irlande : je me suis trompé, je n’avais fait que l’effleurer. C’est pourquoi il faut se rendre à Tara. Pour sentir battre son âme. Pour s’allonger dans l’Herbe. Pour comprendre. Pour apprendre. Pour aimer.

Des jeunes filles sur Tara
La stelle de Tara
Dormir sur Tara
Observer le paysage
La croix de Tara
La croix de Tara

Le site mégalithique de Loughcrew

Là-bas, il y a une colline. Sur la colline, encadrée par un barbelé fatigué, un gros tas de pierre où se sont servis des générations de paysans. Quelque part dans ce tas de pierre, une entrée, protégée, où l’on se glisse au compte-goutte, courbé, tête baissée. Un pièce, puis une autre. Le rayon de la lampe illumine des gravures aussi vieilles que le Monde, aussi vieilles que l’Irlande elle-même, qui ont défié le temps et l’espace. Il y a plus de 5000 ans, dans ce qui est peut-être le plus vieux cimetière du Monde, des mains ont tracé des pétroglyphes au centre d’un Cairn, de façon à ce qu’ils soient caressés par les rayons du soleil levant lors des Équinoxes, en mars et en septembre. Aujourd’hui, avec humilité, curiosité et admiration, j’ai découvert ce lieu. J’ai tenté de saisir, essayé de comprendre, voulu savoir. Qui ? Pourquoi ? Dans quel but ? Las, mon ignorance restera aussi immense que la beauté brute et minérale. du site de Loughcrew

Les rochers de Loughcrew
Le sommet de Loughcrew
La tombe à passage de Loughcrew

La cité de Drogheda

Il y a des lieux où vous allez sans savoir à quoi vous attendre. Un point sur une carte, un nom inconnu, des consonances étrangères. Il en va ainsi de Drogheda, “Le pont du Gué” (Droichead Atha en gaélique), charmante bourgade située à 85 kilomètres de Dublin, baignée de la rivière Boyne et dotée d’un nombre impressionnant de monuments abritant, entre autres, une épée, un sceptre, un morceau de la Vraie Croix et la tête momifiée d’un Saint (très) vénéré : Oliver Plunkett. Une nouvelle fois, c’est avec curiosité que j’ai parcouru les artères tranquilles de Drogheda. Comme de nombreuses autres villes d’Irlande, la cité possède son âme, son caractère intime. Ici, c’est l’Histoire qui est présente à chaque coin de rue, dans chaque bâtiment. On ne peut pas faire trente pas sans s’arrêter pour écouter les anecdotes, les récits. Les balades donnent lieux à des surprises : une porte massive, une vue dégagée, le cri d’une mouette, les rires des enfants. Au regard de son passé trouble, marqué par des combats sanglants, des massacres et des batailles, il est heureux de se rendre compte que Drogheda est devenue de nos jours une halte paisible sur la route du voyageur curieux, avide d’en savoir toujours plus. Que ce soit par une matinée brumeuse, une chaude soirée ou dans le brouillard et le silence d’un cimetière, vous y êtes les bienvenus : Drogheda n’attend que vous.

le brouillard matinal à Drogheda

le cimetiere de Drodheda
La cathédrale de Drogheda

Drogheda

la mouette de Drogheda

La Beaulieu House

S’il y a quelque chose que j’ai très tôt appris en Irlande, c’est qu’il ne faut JAMAIS se fier à un aspect extérieur pour décider de ce qu’il peut y avoir à l’intérieur. Prenez ainsi l’exemple de la Beaulieu House, un domaine possédé par la même génération pendant 11 générations avant d’être ouvert au public dans les années 70, faute de repreneur. Derrière une bâtisse plutôt bourgeoise meublée avec goût se cache des jardins simplement splendides, traités avec soin et où j’ai adoré flâner et jouer à me perdre dans les petites allées, entre un ange, une pergola et quelques massifs. Souvent, on parle de merveilles, de patrimoine, de beauté indicible. Or, se sentir bien, simplement heureux d’être là et de pouvoir profiter, n’est-ce pas en définitive la plus belle des choses lorsqu’on voyage ?

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La petite ville de Carlingford

Y retourner dès que possible. Y revenir et me replonger dans les petites ruelles. Savourer le goût sans pareil d’une Smithwicks. Fredonner Ride On pendant un concert, refermant ainsi une parenthèse ouverte à Ballina en 2003. Partir à l’aventure dans les montagnes, crapahuter, suer comme un bouc, sourire devant le panorama. Apercevoir l’arbre où niche la Reine des Fées, saluer le dernier Leprechaun. Me perdre, trouver des ruines, m’y balader, tourner en rond. Demander mon chemin, me voir offrir la bienvenue et un lift jusque l’hôtel. Regarder le lough s’étendre à l’infini et deviner les hauteurs dissimulées dans la brume. Voir le paysage s’en aller et disparaitre. Avoir l’amertume d’un départ dans la bouche. Se dire que Carlingford, c’est tout ça… et bien plus encore.

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Le site de Monasterboice

Quelque part sur une route, se trouve un site mystérieux, peuplé de croix et de tombes fatiguées : Monasterboice. J’y suis allé, j’ai vu et j’en suis ressorti songeur, l’esprit parti et la tête ailleurs. Entourant la (probable) plus vieille croix d’Irlande, jouxtant elle-même une tour aussi haute que massive, ce sont des centaines de tombes abandonnées, comme lassées et oubliées. Les stèles sont vieilles – plusieurs siècles – et égrainent inlassablement le rythme des existences humaines. Le jeune père que je suis a été marqué par le nombre d’enfants jeunes, terriblement jeunes, inhumés en ce lieu. Tandis que j’erre, mon regard se pose et accroche des litanies d’unités ne dépassant que rarement la dizaine. A l’ombre de l’Histoire, ce sont d’autres histoires, d’autres drames, d’autres tragédies qui sont racontées entre deux dates. La visite d’un tel lieu est un instantané de ce que fût la vie dans les campagnes d’Irlande à une certaine époque. Une vie rude, austère, compliquée, à des années-lumières de ce qu’elle est aujourd’hui. L’ambiance bucolique de ces lieux d’inhumation à mi-chemin entre pèlerinage et abandon ne cesse de me laisser interrogatif. Je marche lentement, doucement, veillant à rien piétiner et, sur un dernier regard, je m’en vais, plus troublé par mes morts que par les Croix. Intriguant et troublant Monasterboice !

La croix de Monasterboice

Une tombe de Monasterboice

Monasterboice

Le château de Trim

“I dreamed a Trim of times come by, when the Irish Flag was high…” (sur l’air des Misérables) : c’est ce que je n’ai cessé de fredonner pendant toute la visite du massif château de Trim, utilisé notamment pendant le tournage du légendaire Braveheart (avec de vrais morceaux de Mel Gibson/William Wallace dedans). Entre deux discussions avec le guide sur les techniques de décapitation au Moyen-Âge et le pourquoi du comment les escaliers en colimaçon étaient un outil défensif de premier ordre, j’ai apprécié de découvrir l’histoire de ce monstre recouvrant 30 000 mètres carrés, ce qui en fait simplement le plus grand château du pays !

Les ruines de Trim

La tour de Trim

Slaine Castle

Adoubé par U2 qui s’y est installé en 1984 pour produire l’album The Unforgetable Fire, mon nom irlandais s’écrit (mais ne se prononce pas) Caisleán Bhaile Shláine. Construit en 1701, mon intérieur est aussi flamboyant et impressionnant que mon aspect extérieur est grisâtre. Avec une bibliothèque d’exception et un amphithéâtre naturel, je suis un lieu où se tiennent des concerts de folie. Je suis, je suis, je suis… Slane Castle !

Le château de Slane

Dublin et Malahide

Je triche (un petit peu) en incluant Dublin et Malahide dans mon voyage sur les Terres Ancestrales Irlandaises. Pourtant, après réflexion, c’est un choix qui me parait logique puisque, personnellement, c’est là que tout a commencé lorsque je suis arrivé, sous la pluie, pour retrouver une nouvelle fois ce pays qui m’est si cher. Un pont, des reflets, des jeux de lumières et un escalier, une trilogie pour ouvrir, une trilogie pour conclure !

Les ponts de Dublin
Les promeneurs de Dubin
Les escaliers de Malahide

Cet article fait suite au blogtrip #IrelandsAncienEast créé, organisé et géré par I-Ambassador en partenariat avec Tourism Ireland. Comme d’habitude, je garde un contrôle éditorial entier sur le contenu publié ici.