Etrange Islande

Étrange Islande

3 ans après mon premier séjour, voici donc deux semaines que je suis de retour sur la terre bénie d’Islande, ce pays rocailleux et volcanique qui fait fantasmer des générations entières de voyageurs, depuis Jules Vernes jusque la Team Givrés…

Pour autant que la beauté soit toujours aussi présente, que les paysages ne cessent de m’enchanter, j’éprouve cependant une impression étrange depuis mon arrivée. Il m’est difficile de mettre des mots précis sur ce sentiment. Je remarche sur mes traces, redors dans des endroits déjà fréquentés et erre paisiblement sur des chemins déjà maintes fois foulés… sans retrouver l’enchantement béat des premières fois. Tel lac ou telle montagne, tel geyser ou telle source qui m’avaient fait bêler de plaisir ne provoquent plus en moi qu’un sourire, un haussement de sourcil, une moue amusée. Je suis certes toujours ravi d’avoir la chance d’être ici et de reparcourir à nouveau le pays mais… quelque chose a changé, quelque chose d’intangible, de fragile, de léger et volatil.

La brume et les sources

Je découvre, autour de moi, que l’Islande est devenue une destination trendy, envahie par des hordes de touristes francophones. Par un camping où la langue qui résonne dans les airs ne soit teintée de francophonie. Pas un lieu où les marques ne soient du Quechua, du Decathlon (ou autres produits nationaux). Pas une halte où je ne reconnaisse les guides labellisés Routard, Petit futé ou Lonely Planet. Le sorry laisse sa place au pardon, sans excuse et sans révérence, brutal et abrupt changement linguistique majeur. Plus prosaïquement, je découvre aussi, effaré, une hausse terrifiante des prix de l’hébergement. Mon budget a sombré dans le rouge dès les premières nuits et mon seul souci est de limiter la casse financière causée par cet aspect non programmé.

La glace de Jokulsarlon

De surcroît, venant s’ajouter à la litanie de mes plaintes, un temps maussade, pluvieux, moche et humide. Si certaines paysages ne révèlent leur beauté intrinsèque qu’une fois recouverts d’un vaste et épais manteaux de brume, il est terriblement lassant de ne vivre que pour une poignée de rayons d’or, de n’espérer qu’une éclaircie et de soupirer en entendant les gouttes marteler le toit de la tente une fois la nuit venue.

La solitude de Skaftafell

Heureusement, l’alternance est présente et offre quelques moments délicieux, savourés et partagés. Le fjord de Djupivogur et sa partie de cache-cache avec les nuages, les hauts-plateaux environnant Myvtan ou la découverte des icebergs errant au large de Jokulsarlon sont des moments uniques que je conserve bien au chaud. Je garde aussi, tout contre mon cœur, ces vapeurs s’élevant du sol au beau milieu de nulle part, dans une halte nommée Hveririr et m’offrant un cliché loin d’être immonde…

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Bien sur, ce voyage n’est pas encore terminé et bien des choses sont encore à venir. Bien sur, ce billet est écrit à chaud, entre deux averses et contemplant par la fenêtre un temps sinistrement gris, laineux et embrumé. Bien sur, j’interprète ici un quelconque rôle, surjouant et psalmodiant un tantinet… Mais cette Islande que je chérissais me semble changée… et je ne suis pas si sur que ce soit en bien.