Soyez prévenus: cet article se situe quelque part entre brûlot et pamphlet, contient de la mauvaise foi concentrée à très haute dose, est d’une subjectivité absolue et ne fait aucunement valeur de vérité générale, indiscutable ou définitive
Écrire un blog de voyage est un exercice fascinant.
Écrire sur le monde des blogs de voyage est un exercice déroutant.
Depuis que j’ai commencé à étudier le phénomène d’un peu plus près, il ne passe pas une seule soirée où je ne reste ébahi devant des contenus édifiants, des conseils aberrants ou encore même des directives pures ne laissant strictement aucune marge de manœuvre au pauvre lecteur, se trouvant confronté à un fait accompli dont la véracité est absolue, inattaquable et faisant office de Bible.
Je ne ne suis pas là pour réfléchir sur l’interaction entre un auteur et sa communauté, ni sur la façon de manipuler, d’orienter et encore moins sur la libre conscience dudit lecteur (mais ça ne saurait tarder…).
Ce que je fais aujourd’hui par contre, c’est cracher mon pâle et inoffensif venin sur une catégorie bien particulière, celle la même qui me donne envie de m’enfuir, de hurler, de crier, de laisser sortir ma haine et ma rancœur, mon aigreur: les Intégristes du Voyage!
Pourquoi “Les Intégristes” ?
Un intégriste, selon MA définition, est une personne qui défend mordicus sa position, becs et ongles, prêt à mourir , campé sur (et pour) ses vérités.
Même si le mot est chargé de nos jours d’une très forte connotation péjorative, je tiens à son emploi car il représente étymologiquement ce que excrétoire au plus haut point : le partisan du maintien.
Avec ce genre de personnes, la discussion est quasiment vouée à un échec total. IL a raison et VOUS avez tort. Tel est le plus souvent la conclusion de tout débat.
Comment les reconnaitre ?
Dans ma carrière, j’ai souvent rencontré des gens ayant, de leurs propres dires “tout vu et tout fait”.
En dehors même de l’incroyable orgueil d’une telle assertion – qui me laisse béat à chaque fois – certaines détails reviennent en boucle et permettent très vite d’identifier l’Intégriste:
Rien n’est nouveau pour lui , rien n’est égal à son expérience et tout votre savoir accumulé ne représente qu’une infime, microscopique et méprisable partie en comparaison du sien.
Il ne manquera pas d’ailleurs de vous le faire savoir, à grands renforts de “Moi je” et, conséquence logique du tout, vous passerez, à ses yeux, pour “le petit parvenu arriviste qui rêve de grandes choses mais qui joue dans la cour des petits”
Le Parangon de l’organisation, le Vertueux Nomade
Notre Intégriste ne connait qu’une et une seule façon de voyager: le programmé de A à Z.
Il a son programme, détaillant à la minute précise ce qui doit être fait, comment cela doit être fait, où cela doit être fait et envisage de même tous les scénarios possibles et inimaginables, du pire au meilleur en passant par le tiède.
L’avantage de ce mode de fonctionnement: lui permettre d’en voir le plus possible, en rentabilisant chaque minute, voire même seconde de son emploi du temps. Comme un Ogre se jette sur les petits enfants, il se jette lui sur les musées, monuments et autres “Trukavoir, Trukafère”, ce qui lui permettra ensuite de vous lancer un regard chargé d’un mépris insoutenable lorsqu’il vous parlera de son voyage: un parcours borné, ultra-ciblé, ultra-délimité, tracé sur une route droite d’un ennui à en mourir.
D’autre part, notre ami connait bien le monde actuel; il n’est pas donc le dernier, loin s’en faut, à se réclamer Voyageur Nomade, Eco-Responsable, Etiquo-Citoyen, galvaudant et piétinant avec allégresse toutes les valeurs défendues derrière ces appellations.
NOUS, les voyageurs
Comme je l’ai déjà dit plus haut, vous n’êtes qu’un apprenti dans un monde de professionnels, un débutant tout juste bon à prendre des notes, un bourlingueur urbain, un faux caïd.
Le VI parle de lui-même avec emphase, émotion, la larme à l’œil et les mains tremblantes. Et quand il se réunit avec sa confrérie, c’est alors un échange d’anecdotes personnelles, de comparaison de “Kicékalaplugrosse” où les égos s’exposent comme des melons trop murs sur un marché provençal, sans se rendre compte qu’ils ont dépassé depuis longtemps la date de péremption.
De la vie réelle à Internet
Les blogs ont cela de merveilleux qu’ils permettent de partager avec l’immensité infinie de la Toile. D’un vieillard cacochyme, vous pouvez passer au super héros. D’ado frustré par son acné, vous devenez le symbole phare d’une génération maudite. D’obscur anonyme, vous êtes subitement un bloggeur influent.
Le VI a très vite compris l’intérêt potentiel de créer et tenir un blog de voyage d’où il pourra partager, unilatéralement, sa vision du monde et faire connaitre son enseignement d’une sagesse vouée à la Légende.
On croise souvent ce genre de site, où l’auteur s’autoproclame “Expert en Voyage”, énonce le nombre de pays visités, le nombre de langues parlées, l’état miraculeux de sa réussite financière, de l’augmentation stratosphérique de ses stats.
C’est de même, étrangement, les endroits où vous êtes assaillis par une armée de PopUp de pubs, par des réclames pour des Ebooks miracles et où la navigation est un long et dur calvaire, entre deux articles d’un inintérêt aussi glacial que mortel.
La conclusion pas si ironique que ça…
Si ça se trouve, j’ai décrit exactement ce à quoi je ressemble !