Je suis un vieux con nostalgique

Je suis un vieux con nostalgique

Tasse de café fumant dans une main.
Carnet ouvert dans l’autre main.
Les yeux rivés sur l’écran.
Je grogne. Je vitupère. J’éructe.

Ce matin, je me sens vieux, con, aigri et nostalgique. A 33 ans bien tassés depuis octobre dernier, je viens de me surprendre en pleine crise existentielle de “Et si, en fait, c’était mieux avant ?”.  Je regarde les tweets défiler sur ma Timeline et je ne peux m’empêcher un petit rictus de dédain, un soupir désabusé ou un écarquillement subit des yeux.

Quoi ? Encore ce sujet ?  Comment ça ? Je rêve ou ils ont vraiment osé tartiner 900 mots sur ce truc vieux comme le monde ?

Je grogne à nouveau et me lance dans la tournée des blogs que j’aime et qui ne cherchent pas à tout prix à être sous les feux de la rampe. J’admire un joli contenu, je souris devant une anecdote, je fais une moue admirative devant certains clichés. Je me dis, en même temps que je saute d’onglet en onglet, que l’Internet est vraiment un monde étrange où la qualité est aussi aléatoire que la réussite.

Bordel mais non quoi… Sérieusement… Dix ans que ça existe et ils en refont un article…

J’essaie de me concentrer sur le boulot à faire. Sur les papiers à écrire, à traiter, à rendre dans les temps. Je tartine en mode mécanique, sans avoir à réfléchir, écriture presque intuitive, tournures rituelles. Quota atteint. Je retourne marmonner. Je lâche Twitter et bouge sur Instagram. Je sélectionne une photo, découpe, retouche et balance le cliché avec une pelleté de hashtags bien choisis. Aucune idée de ce qui marche ou pas, je me contente de poster du beau, sans trop penser.

Oui… 30 hashtags maximum… Oh et eux tiens, ils ont taggés pas moins de 17 comptes différents… Bravo !

Je me revois, quand j’étais ado en Allemagne. Mon meilleur pote, pendant ces voyages paternels, était un bouquin : le Routard. Après trois semaines à consulter chacune de ses pages, je crois que je le connaissais par cœur. A l’époque, pas question de téléphone, d’internet, de blog ou de forum. C’était totale confiance dans les bouquins, un détour par l’Office de Tourisme et basta, démerdez-vous les gars ! Je me revois aussi galérer dans les rues de Vienne, à 17 berges, en allant acheter un jus d’orange au Mac Do ou en retournant pour la septième fois en trois jours dans LA boutique de cartes postales où la vendeuse m’avait souri.

Putain… C’était le bon temps, l’école de la débrouille, les bancs de l’apprentissage…

Et cette galère en Irlande, pour ma première nuit en famille d’accueil où la nana m’a dit “Bonsoir” avant d’aller se bourrer la gueule à la vodka dans son pub, avec ses copines. Je me rappelle comment j’étais presque effrayé à l’idée de me balader seul dans les rues d’une ville inconnue, sans plan, sans rien. J’ai interpellé une voisine pour lui demander d’écrire le Street Name sur un bout de papelard, histoire de savoir quand même où j’habitais. Pas de wifi, pas de Google Maps, pas de solution de secours virtuelle.

Et ouais… C’est aussi comme ça que j’ai appris. Zone de confort ? Rien à foutre !

Éléments de langages.
Mise en avant d’un voyage banal.
Glorification d’un égo déjà sur-développé.
Masturbation intellectuelle permanente.

N’empêche, je me marre mais je ne suis pas forcément le mieux placé pour en parler avec mes grosses ficelles, mes ritournelles prosées et certains de mes articles baitclick. L’hôpital qui se moque de la charité ? J’ai l’impression que tout était mieux avant. J’ai l’impression que Demain n’invente rien et qu’on tourne dans des cercles déjà mille fois parcourus. J’ai l’impression qu’aujourd’hui est une photocopie d’hier et le jour d’après sera un copié-collé d’avant hier.

Au secours.
Je crois que je suis devenu un vieux con nostalgique
(Et j’assume !).

  1. Je comprends tout à fait et je me disais ça récemment aussi, je pensais au temps où je n’avais pas d’ordinateur, j’écrivais, je lisais pendant des heures et je dessinais. J’étais heureuse. Mon inspiration était bien meilleure, mon cerveau un peu moins ramolli. Je devrais prendre du recul de temps en temps et me déconnecter.
    Après je me rends compte aussi que sans Internet et sans les blogs, il y a plein de choses que je n’aurais pas réaliser, que je n’aurais pas fait. Alors quand même tout ça c’est chouette. Il y a du bon, il y a du mauvais. Comme il y a des bons guides du routard et des mauvais. Comme il y a des bons livres et des mauvais. Et que malheureusement, ce n’est pas toujours les meilleurs qui ont la visibilité qu’ils méritent…

    1. Je suis d’une mauvaise foi assez terrifiante en fait, parce que je grogne (presque) sur ce qui constitue mon pain quotidien. Cependant, faut pas se leurrer : j’attaque rien de spécial ici, je me contente de jouer mon rôle de vieux con nostalgique. Et ça m’amuse follement en fait !

      Sinon, je suis d’accord, c’est les bons chasseurs, les mauvais chasseurs, les bons blogs, les mauvais blogs… Chacun y cherche et y trouve ce qu’il y veut !

  2. Une réponse de rappeur…

    “Mais tu tournes depuis trop longtemps
    Comme de la viande dans un grec
    Votre truc c’est pas frais ça se sent
    Faudrait arrêter les mecs
    Car c’est gênant pour tout le monde
    Comme une poussette dans le métro
    Plein de trentenaires boom-bap
    Enfermés dans le rétro
    Au son du « c’était mieux avant »
    Se niquent les muscles cervicaux
    J’me sens tout seul face à ces cons
    Tous corrompus comme Serpico
    Il ne reste plus que des trucs moches
    Comme à la fin des soldes
    Rien à branler
    Ne crois même pas que ça m’désole…”

    Mais je ne suis pas en désaccord fondamental 🙂

  3. J’adore mais je me sens flouée! On ne t’a pas dit que tu dois attendre 40 ans pour oser porter ce titre de “vieux con”? En attendant, tu as droit à “gros râleur français”, un pléonasme auquel on a droit à tout âge!
    Meilleures salutations à l’ancienne d’une mamie voyageuse de 41 ans! 😉

    1. Non, c’est l’hôpital qui se fout de la charité comme je le signale dans mon dernier paragraphe, héhé (et je me demandais si quelqu’un allait quand même me faire la remarque) 😉

  4. J’aime bien ce post. Je ne suis pas vieille non plus et je me sens vieille. Et ce n’est pas tant sur la pratique du blogging (après tout c’est plutôt cool qu’il y ait autant de styles et de qualités différentes) mais sur les débats sur les réseaux sociaux… Les “moi moi moi” sur instagram m’insupportent pas mal (j’aime le thé, les to do lists et vous?). J’ai l’impression que c’est une autre culture à laquelle je ne m’identifierai jamais.

    1. Salut Océalie !

      La pratique du blogging, c’est un sujet presque accessoire en fait dans ma pensée, dans cet article. Comme d’hab’, je lance quelques pistes en passant mais je vais pas chercher ouvertement plus loin.

      Quoique…

      1. Je comprends bien. Et moi j’ai donné mon avis de “vieille conne” ;). Le networking est un monde à part. Il y a du bon (très souvent), avec de la solidarité, du partage, de belles valeurs… et puis du moins bon ! En fait, comme partout.

  5. Grâce à la magie d’internet, tu repostes un vieux post pour le proposer une nouvelle fois à la lecture et je pense qu’au moment où tu vivais tes oldies, beaucoup étaient déjà passé avant toi et sans guides du routard… y’aura toujours quelqu’un pour avoir fait, vu, lu, entendu les choses avant nous… y’aura toujours quelqu’un pour avoir écrit, pensé, composé, inventé quelque chose avant nous… je te rejoins si l’on parle des gens qui reproduisent du contenu déjà publié sans rien apporter de nouveau ou de personnel… Mais bon, faut pas se freiner, ça fait du bien aussi la nostalgie, ça remonter le moral quelque part bizarrement, on se dit, “moi au moins j’ai vécu des trucs que les nouveaux là yzont pas vécu ! Ha !” Et on passe à autre chose. Pour finir, je pense que tout à déjà été fait mais que tout est à réinventer.

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