Match à haute tension

Grosse affiche hier soir à Winter Game Canada Center avec une rencontre rien moins qu’amicale entre les Etrangleurs de Grizzlis et les Dépeceurs de Caribous.

Deux équipes de sept joueurs sur un terrain indoor en synthétique, des buts de la taille d’un Passe Partout allongé, du sang, des larmes, des groupies en folie et des chasubles jaunes.

Votre humble serviteur ayant été transféré le temps d’un soir en échange d’une indemnité d’une pinte de Yukon Red se retrouve titularisé avec les Etrangleurs de Grizzlis. En face, une mamie customisée avec quatre poumons, une espèce de Spiderman qui intercepte tous les ballons avec ses jambes arachnéides, une fille paumée qui confond catch et soccer. A noter aussi la présence d’un Karim (surtout pas Benzema) amputé d’un genou mais trop timide pour le signaler et d’un blondinet qui ferait passer Carl Lewis pour une tortue rhumatisante.

Début de match calme, avec uniquement quelques prises de balle peu aventureuses. On notera deux tacles au larynx et une semelle amoureusement déposée sur le tibia d’un joueur par le Gardien manchot des Dépeceurs.

C’est moi-même qui a eu l’immense honneur, le privilège de dépuceler le tableau de score avec une action digne de mon incommensurable talent: interception aux 6 mètres, remontée de balle fulgurante sur tout le terrain, fixation du gardien et intérieur du pied le plus minable de l’histoire du football. Le ballon, très vaguement tirebouchonné, trouve le moyen de passer dans le cinquième trou – entre les jambes de la gardienne – et de finir sa lente course au fond des filets. 1/0 pour les Etrangleurs

Etant d’une nature partageuse, je pars cracher mes poumons sur le banc et laisse rentrer un clone de Chris Waddle, virtuose avec une main à la place du pied. Le jeu s’équilibre avec une charnière centrale des dépeceurs qui a retrouvé ses marques. 300 kilos à eux deux et rien qui passe. Le seul a avoir essayé git encore dans un coin du gymnase. Sur une contre attaque rondement mené, Mme 4 poumons profite d’un contre favorable pour remiser dans le paquet où elle trouve Le détrousseur de ballons local qui la met au fond et la met bien, tel le renard basique des surfaces yukonnaises. 1/1 à ce moment la.

Je rentre en jeu, fait mon Benzema sur trois contre attaques: passe à contre temps dans un espace temps inconnu, direction le vide intersidéral. Les dépeceurs sont décidés à passer à la vitesse supérieure et ont affuté leurs crampons qui rendraient jaloux les Machs 3 de chez nous. Plusieurs jambes sont ainsi épilées pour un long temps. Sur une nouvelle contre attaque, je fais mon Goldorak, fulgurose pointise avec le ballon, dribble le goal, me retrouve au point de corner, redresse la balle tel le Juninho moyen et adresse un centre metrémisé pour mon collègue de pointe qui pointe justement et envoie le ballon échouer dans le but. 2/1 pour les Etrangleurs de Grizzlis.

Quelques minutes après, le chronomètre continuant à vivre sa vie, je suis lancé dans la bonne direction, vers le but adverse, par une merveille de passe de profondeur, un contrôle foireux plus loin, trois roulettes, quatre ou cinq passements de jambe et une dizaine de sombréros, premier centre contré par le Mur local, le ballon, fort obligemment, me revient dessus. Je le prends avec determination, lui tape un bout de discuss’ et l’envoie, avec un admirable plat du pied légèrement brossé dans un sens N/NE , dans les pieds du Rudi Voller yukonnais qui ne se fait pas prier. A noter l’admirable camaraderie des Depeceurs de Caribous qui faisaient en même temps un concours de mime de piquet. 3/1 pour les Etrangleurs de Grizzlis

La fin du match, tel un film porno, est haletante. Je cède encore ma place, regarde les autres courir et suer. Je vois surtout le blondinet cocaïnoman envoyer des cinq mètres une “praline, une cacahouète, une pastèque” sur la barre. Je vois aussi le Karim seul devant le but grand ouvert envoyer la chique dire bonjour au poteau. C’est finalement l’Albator local, même coupe de cheveux mais moins classieux, qui se l’emmène et se la régale au milieu d’une défense située entre le gériatrique et le végétatif  pour derechef faire claquer les filets. 3/2 et score final.

Bon petit match, amusant, d’un niveau technique parfois lamentable, parfois surprenant. Foule hautement sympathique et rendez-vous la semaine prochaine.