Arrêter ou continuer: la vie d’un blog de voyage

Il y a quasiment quatre ans jour pour jour, j’entamais la rédaction du tout premier article de ce blog, deux semaines avant mon départ canadien.

Je me revois encore très bien assis sur ma chaise en face de mon ordinateur, découvrant WordPress, cherchant – déjà ! – un titre accrocheur et rédigeant à la volée un contenu aussi intimiste qu’abscons, clairement destiné à un tout petit cercle lectoral.

Depuis, bien de l’eau a coulé dans les fleuves: 640 autres articles sont nés de ma féconde plume digitale, ce site a pris une importance relative et mon égo se retrouve presque flatté lorsque je regarde le chemin parcouru depuis mon tout premier thème vérolé par des liens russes.

Aujourd’hui, j’ai renouvelé une fois de plus l’hébergement et donc pris la décision de continuer à écrire, à raconter, à narrer cette vie que je mène (ou que j’ai mené, c’est selon) autour de ces sempiternels même axes d’écriture que sont le Voyage, les Voyageurs, le PVT et autres assimilés.

Pourtant, j’ai bien failli tout arrêter là et fermer la porte une bonne fois pour toutes.

Pourquoi avoir voulu arrêter ?

Contrairement à bien d’autres de mes “collègues”, je ne me réclame aucunement du groupe des “Travailleurs Nomades” et je ne cherche absolument pas à monétiser de quelques façons que ce soit mon blog: je refuse d’y afficher la moindre publicité, d’y insérer le moindre lien déviant et je garde une ligne éditoriale fixe, rigide, étroite ne laissant que peu de places à d’éventuels partenariats.

Pour ainsi dire, je reçois assez régulièrement des offres de collaborations, des demandes d’échange de liens: j’y réponds beaucoup plus par politesse que par intérêt car, honnêtement, je ne vois pas l’intérêt d’une telle manipulation hypocrite: j’espère en mon for intérieur que les sites qui me lient le font parce qu’ils apprécient le contenu que je fournis et non pas dans l’attente d’un même geste de ma part.

D’autre part, j’ai énormément de mal avec la mendicité sociale, celle-là même qui consiste à aller commenter un peu partout pour ensuite attirer le chaland, celle-là même qui exige, requiert, oblige à spammer l’intégralité de ses contacts pour un petit vote dans un petit concours, celle-là même qui fait que certains déshumanisent leur contenu en mettant des robots tweetants à tout va.

Je comprends certes ce besoin de devoir exister, d’assurer une visibilité constante, d’être présent, encore et encore, là où le buzz se fait et se défait mais j’ai pris mon parti: ce n’est pas pour moi.

Pourquoi continuer alors ?

La raison est simple, vitale, concise et tient en sept lettres: P.L.A.I.S.I.R.

J’écris parce que j’aime ça, parce que c’est une passion, un besoin, un leitmotiv. Chercher la bonne formule, agencer des phrases agréables à lire, traquer les répétitions et jouer sur les synonymes, faire, défaire et refaire les mots, rebondir d’idées en idées, chercher la précision linguistique, transcrire des pensées en contenu exploitable, apprendre encore et toujours.

Je passe souvent de longs moments purement égocentriques à relire certains des mes articles: j’y vois des évolutions très nettes entre du personnel pur et du généraliste sans âme, des digressions infinies, des morceaux de gloire, des ratés lamentables, des séries pas achevées et des choses que j’aime.

La lecture de certains mammouths de ce milieu me peine parfois: je n’y lis aucun contenu personnel, aucune approche particulière, seulement des positionnements neutres, des recettes éculées, du banal formalisé et des articles puant  dans le formol tellement ils ont été usés  jusqu’à la corde.

Je ne suis pas hypocrite: j’utilise moi-même de temps à autres ces méthodes, ces Top 10, ces “How To”. Cependant, l’exercice bien qu’intéressant est d’un ennui suprême , à un tel point que je ne comprends pas qu’un site ne puisse  fournir que cela: un contenu vide, lisse, sans âme.

Le futur

A l’heure où la tendance, aussi moche soit-elle, consiste à fournir l’information sur un plateau d’argent,  toute prête, emballée, encadrée et ne nécessitant plus le moindre petit effort intellectuel pour l’acquérir, il devient urgent de s’interroger.

Lorsque tout est présenté comme vrai, que rien n’est vérifié, sourcé ou prouvé et que nul ne fait plus le moindre effort pour aller chercher, débusquer ou trouver les sources, preuves ou indices disponibles, c’est que les symptômes sont graves, à l’extrême limite du létal.

Le Fast Thinking pré-mâché sera-t’il le fossoyeur de notre génération, de nos rêves, de notre époque ?

  1. Je me retrouve assez dans ta démarche, celle du plaisir, et non de la monétisation. Comme mon blog était vraiment thématique autour d’un voyage d’un an, une fois le voyage terminé j’ai arrêté d’y écrire, et c’est resté comme une archive.

    Je pense que tu as raison, de ne continuer que pour ton propre épanouissement personnel, et non celui du portefeuille… c’est ce qui permet de rester authentique, de garder ta propre voix dans un univers où les blogs les moins intéressants sont étrangement les plus visibles.

    Pour ce qui est de la pub sur mon bog, c’est seulement quand j’ai arrêté d’y écrire que j’ai installé des pubs Google. À ce jour, je ne crois pas avoir récolté assez pour rembourser les frais de nom de domaine.

    Bon courage pour la suite, et surtout amuse-toi bien 🙂

    1. Merci de ton passage ici Joachim.

      Ton passage sur “où les blogs les moins intéressants sont étrangement les plus visibles” est particulièrement éloquent: la communication prenant le pas sur l’écriture, on se retrouve bien souvent avec des contenus certes dignes d’un certain intérêt mais ô combien déjà lus et relus ailleurs !

      Quant à la publicité… je continue à m’y refuser (sauf en cas d’offre faisant de moi un multi-millionaire… minimum !).

      Bonne continuation à toi aussi 🙂

  2. J’ai toujours un trafic tout pourri sur Let’s Go!, mais même si j’ai du contenu (intéressant ou pas, je ne sais pas, mais j’en ai, et en tout cas il est personnel), je m’amuse comme ça. J’ai l’impression que beaucoup de bloggeurs finissent par oublier ce paramètre, celui qui donne de la vie à un blog (comme tous mes blogs préférés, dont le tien, et ceux d’Alice en québéquie ou de correeresmidestino, quoi) !
    Continuons à être pauvres 😀

    1. “J’ai l’impression que beaucoup de bloggeurs finissent par oublier ce paramètre, celui qui donne de la vie à un blog”

      Tout ce qu’il y a de plus d’accord avec toi: le formatage, ça tue.

  3. Article intéressant ! J’ai souri aux premières lignes en lisant la “rédaction d’un poste abscons pour les proches” 🙂
    Je suis partie vivre aux Etats-Unis et est ouvert un blog à cette occasion, je voulais m’occuper de façon créative en attendant de trouver un boulot, et c’est vrai que le facteur plaisir + bel album interactif de souvenirs reste ma motivation première pour continuer – en même temps, c’est tellement prenant, il vaut mieux avoir vraiment envie de le faire.
    Au plaisir,
    Mathilde

    1. Hello Mathilde

      Ravi que l’article te plaise 😉

      Tu m’étonnes que c’est prenant: une fois que tu as mis le doigt dedans, t’es foutu et tu as juste une envie: continuer !

  4. Trois articles lus sur le blogging, ça y est tu as gagné un lecteur récurrent :-D. Très belle plume, très agréable, la preuve j’ai lu trois articles à la suite ce qui ne m’arrive jamais!

    J’aime bien ta conception du “no money” juste le plaisir, c’est ça le plus important et le plus intéressant pour le lecteur je pense. Un auteur qui écrit sans envie se ressent tout de suite.

    Comme tu le répètes si bien à plusieurs endroits, bloguer pour le portefeuille est une grosse blague. Ca serait marrant de voir un jour le salaire horaire des blogueurs gagnant modestement de l’argent avec leur blog. On doit tourner autour de quoi…1 centime l’heure ?

    1. Hello (encore) Hervé,

      Ravi de voir que mon contenu te plait 🙂

      Je dois avouer que j’espère bien quand même un jour réussir à vivre de tout ça (et en fait, plus par les opportunités offertes via le blog que par le blog lui-même), ce qui se passe déjà partiellement 🙂

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